mercredi 1 juillet 2015

L'atelier d'écriture de Sabine Huynh (1/3)



Fragments composés à partir de "Théorie des orages" dans le cadre d'un atelier d'écriture animé en février 2015 par Sabine Huynh

La pensée née de la lumière rit à la nuit.
Pas étonnant, c’est la chanteuse de blues, esclave des cascades vitales qui trempe dans l’eau tous les souvenirs comme un reflet de la ferme réalité et de ses divagations.
Le long du métal hurlant, l’étranger est tombé sur le pare-brise gluant d’un camion. Se détend les poings et salue les terriens.
Lancé sur la courbure trépignante de l’espace temps, il enregistre à l’insu de tous le contour multiple des forces désorganisées de cette planète. Regarde autour de lui un déversoir d’images à éplucher .
À la recherche de la carte de ce monde étrange, il frotte contre toutes les aspérités d’un savoir de gratte-papier, une ébauche de l’alphabet des astres.
Le cristal de sa conscience aspire la musique de blues perçue lors du passage sonore essuyé lors de son atterrissage.
La musique l’atteint  encore par un ensemble de paramètres étrangers à son recyclage de connaissances pourtant abouties noir sur blanc.
Retrouver la source de cette musique pourtant surcharge banale strictement interdite du goût divinatoire de sa planète.
Comprend qu’il serait bon d’être sous la lumière du soleil depuis le premier jour, surtout du printemps, mais ça peut prendre plus de temps que prévu.
Ces ondes musicales, cri de l’étendu, sans doute aliment fantôme de ces êtres à deux jambes. Le flairer, le débusquer, en suspecter le code.
Aligner, synthétiser, analyser le dépôt des sons, matière première ni rare, ni précieuse mais difficile à démêler.
Porosité des sons organisés, malheureusement détournés par d’étranges et aveugles bruits nocifs, bio-technologiques qui mordent de part et d’autre un corps encore immesurablement mou.
Des voitures poussent des hurlements atroces, cris intenables, quelque chose de très décisif, déchirent ses aspérités. Rien ensuite.
Pas de mode convenu, seuls des claquements stridents, impudents, angulaires, strangulaires.
Ces pouilleux usurpateurs percent les circuits encore libres de ses réseaux internes, le menacent jusqu’à évanouissement complet.
Parfois l’odeur mobile de la musique hérissée de blues en foule lui revient.
Elle le caresse comme une source avide, comme quoi vivante et fraîche. Couleur d’espoir électrique de toute vraisemblance.
Manifestation d’une nécessité impérative, il lui faut retrouver les contractions brutales qui soufflent à angles de 90 degrés le volume du son.
Il retourne sur ses pas, assez content de rester invisible au regard éteint des terriens trop occupés à s’adresser à des êtres sur des bases solides.
Drôles d’animaux domestiques, drôles de phénomènes, pense-t-il fasciné un moment sans s’y complaire.
Ne peut encore se concentrer autour d’une idée fixe. Ce semble que non. L’air terrestre concentré passe difficilement à jamais dans ses branchies solaires.
Il manipule sa réception verbo-visuelle sous son casque, bientôt arrive dans un lieu obscur.
La lumière musicale croisée s’accroche, astuce de révélation dépouillée et cosmique, sans intermédiaire dans sa partie supérieure, s’abandonne pure et simple.
Immense et seul devant une bouche immense, espace-intro, cage ventrue précisément à l’inverse.
Se gave d’urgence d’un délice sans cause, nourriture jusqu’à étranglement dans ce temps, comme généralement.
De son côté, veut éclater de cette voix, sans même fusionner en étoile limite.
Ne la trouve prête. Hallucination stellaire pour lui tout seul ?
Se met en interdit. Impersonnifié autant qu’il s’en insépare.  En revient effeuillé.
Il s’approche des lèvres noires suçoir, en canon de révolver, orchidée qui ne pousse pas chez lui.
Se dénoue  lentement, se dilue, ruisselle, se répand aspiré à s’en couper le souffle, se heurte sourd tramé à en devenir palpable.
Attention. Risque de métamorphose incomplète qu’on ne sait pourquoi. Délivrance jointe à l’effarement.
Colette Leinman, 9.2.2015

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posted by Lucien Suel at 07:50

1 Comments:

Blogger K said...

Superbe. Quelle ambiance !

20:37  

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