lundi 7 avril 2008

Nous ne sommes pas morts

Nous ne sommes pas morts vient de paraître aux éditions du Dernier Télégramme, disponible en librairie dès aujourd'hui.
Images d'Hélène Leflaive et textes de Lucien Suel.
C'est un livre qui tourne autour du trou.
Voici le début du texte et quelques images d'Hélène Leflaive.


« J’ai l’impression que d’abord il y avait le............., qu’on a construit le..............d’abord, puis la porte au dessus, puis qu’on a construit le café, et que dans ce café il y avait une caissière, trois garçons, enfin deux flippers, des clients, des choucroutes, des assiettes froides, toutes les consommations servies habituellement, mais bon, il y avait tout ça, mais ça ne fonctionnait que pour le.........., que pour le.........., et que tout le reste était de la frime. Tout ça c’était pour le.............. » extrait d’Une sale histoire, film de Jean Eustache 1977

« De la gauche vers la droite, désignez vos objectifs. En joue. Feu à volonté. Cessez
le feu. » Les jeunes gens apprennent. Ils marchent au pas en colonne gueulant des
âneries. La tête se vide. Plus tard, le vent de février souffle sur les pistes de la base
aérienne. Les bleus en bleu marine sont alignés dans le froid, à la dernière minute on
leur a fait enlever les gants de coton blanc. Leurs doigts bleuissent crispés sur la crosse
métallique des pistolets mitrailleurs. Ce sont des MAT 49, nous savons ou nous avons
oublié que cela signifie que le modèle a été créé en 1949 et fabriqué en série dans la
Manufacture d’Armes de Tulle. Le lien avec le tulle aérien dont on décore les automobiles
qui véhiculent les mariés, c’est que le PM MAT 49 fait dans la dentelle à travers les
cartons et aussi à la guerre dans les tissus musculaires des corps humains ou animaux.
L’avantage de tirer c’est qu’on pourrait se réchauffer les doigts sur le fût brûlant du
canon. On imagine des choses mais le Colonel n’arrive pas et les larmes coulent sur les
joues glacées et certains pensent qu’il vaut mieux ne pas avoir de chargeur. Plus tard on
se souviendra de la scène mais on sera incapable de se rappeler comment on démonte
en petits morceaux pour le nettoyer le MAT 49. Tant pis. On aura même oublié le bruit
des munitions 9 mm, jolies balles brillantes et douces au toucher qui trouent la peau,
cassent les os et percent les artères.



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posted by Lucien Suel at 10:17